Madame Francine a été embauchée en 2001 par la société Packetis en tant que chef de service des ressources humaines (gestion du personnel).
Elle a souvent fait remarquer à son employeur qu’elle n’était pas payée de la même façon que ses collègues masculins de même niveau. Son salaire était plus bas et au fil des années, elle avait reçu moins d’augmentations qu’eux. Elle se plaignait également d’une différence de traitement dans le bonus que percevaient les salariés car les hommes avaient une plus grande prime qu’elle.
En 2017, Madame Francine a été licenciée.
En 2018, elle décide de contester ce licenciement devant le Conseil de prud’hommes car il est basé selon elle sur une discrimination liée à son sexe.
Par un jugement rendu en 2020, les juges du Conseil de prud’hommes ont rejeté sa demande et ont estimé que la société Packetis n’avait eu aucune attitude discriminante envers Madame Francine.
Madame Francine décide alors de contester cette décision devant la Cour d’appel de Bordeaux.
Les parties :
Demandeur (Appelante) : Madame Francine
Défendeur (Intimée) : Société Packetis
Question de droit : La société Packetis payait-elle moins Madame Francine que ses homologues masculins et l’avait-elle licenciée car elle était une femme ?
Arguments du demandeur (l’appelante) :
Madame Francine explique que les femmes et les hommes du même service n’avaient pas la même rémunération. Les femmes avaient en moyenne un salaire égale à 7 225 euros par mois, alors que les hommes percevaient 11 725 euros par mois.
Elle affirme que des collègues hommes avaient une meilleure rémunération alors qu’ils travaillaient dans l’entreprise depuis moins longtemps qu’elle.
Enfin, le contrat de travail des hommes leur permettait d’obtenir un bonus de 30% sur le chiffre d’affaires alors que celui des femmes indiquait qu’elles auraient droit à 20%.
En plus de gagner moins d’argent que les hommes, Madame Francine a été licenciée après avoir réclamé une énième fois un réajustement de sa rémunération par rapport aux hommes qui avaient les mêmes compétences et les mêmes responsabilités qu’elle.
Des témoignages indiquent aussi que l’appelante avait un salaire bien inférieur à celui de ses collègues alors qu’elle avait le même niveau qu’eux et que leur supérieur n’avait jamais fait en sorte de l’augmenter car il savait qu’elle ne quitterait pas l’entreprise.
Elle ajoute également qu’une différence de traitement était appliquée dans l’entreprise suivant le sexe du personnel : son supérieur tutoyait le personnel masculin et vouvoyait le personnel féminin, créant alors une distance entre eux.
Arguments du défendeur (l’intimé) :
La société Packetis affirme que Madame Francine a connu de grandes augmentations durant ses années d’expérience au sein de l’entreprise.
Madame Francine exerçait des fonctions différentes de ses collègues masculins, elle avait des compétences et des responsabilités différentes, de ce fait elle ne pouvait pas être payée de la même façon qu’eux.
Le supérieur de Madame Francine ne tutoyait pas les femmes pour éviter la moindre ambiguïté.
Elle a été licenciée car elle avait commis plusieurs fautes dans son travail et n’était pas assez efficace pour l’entreprise. Son licenciement n’avait pas été décidé en fonction de sa condition féminine.
Solutions des juges :
Les juges décident d’annuler la première décision et de condamner la société Packetis.
Le licenciement est annulé car il a été pris sur une décision discriminante basée sur le sexe de la salariée. L’employeur doit payer la différence des salaires que Madame Francine n’a pas obtenue ainsi que plusieurs indemnités pour le mal que ces décisions lui ont causées .
Madame Francine a su apporter les preuves devant la Cour d’appel qu’elle subissait une différence de traitement salariale car elle était une femme. En effet, tous ses collègues masculins qui avaient les mêmes compétences et les mêmes responsabilités qu’elle gagnaient beaucoup plus et étaient augmentés beaucoup plus vite.
Par cette décision, les juges rappellent que l’employeur ne doit faire aucune différence de traitement entre ses salariés, que ce soit lors du recrutement, sur les conditions de travail, sur son salaire, son licenciement ou tout autre décision qui prendrait en compte son origine, son orientation sexuelle mais aussi son sexe.
Sauf si l’appartenance à l’un ou l’autre des deux sexes répond à une exigence professionnelle, toute décision prise par l’employeur sur le seul fait que son salarié soit une femme ou un homme est un acte discriminant. Cour d’appel de Bordeaux 16.06.2022