Que d’images nous viennent en tête lorsqu’on pense à l’éducateur ! Parfois c’est un personnage, issu de notre imagination, aux cheveux longs soutenus par une barbe antique, qui arbore avec fierté une guitare. D’autres fois, au contraire, il se positionne derrière un bureau avec une montagne de dossiers et un regard inquisiteur…. La réalité est bien différente. Alors, qu’est ce qu’un éducateur ? Quelles sont ses missions ? Auprès de quel public intervient-il, pourquoi et comment ?

AVANT TOUT, QUE SIGNIFIE « EDUQUER » ? « La fonction première d’une société est d’éduquer, c’est-à-dire de faire prendre conscience à chacun qu’il peut se choisir un destin et s’efforcer de le réaliser.[…] Il ne s’agit pas de fabriquer des hommes tous conformes à un modèle, ayant tous appris les mêmes réponses, mais des personnes capables de formuler de nouvelles questions »

Albert Jacquard, philosophe Un éducateur éduque. Quand on a dit ça, on n’a rien dit… évidemment. Alors « éduquer »? Peut-on apprendre à « éduquer » comme on apprend les mathématiques ?Un peu d’étymologie peut nous réveiller la mémoire : éduquer vient du latin educare, qui signifie conduire, mener, hors de…Un éducateur est donc celui qui conduit, accompagne, une personne sur un chemin, le chemin de sa vie, pour l’amener à sortir d’une ou de plusieurs difficultés et l’aider à s’épanouir. Autre mot d’importance pour l’éducateur : « aider ». Comment « aider » quelqu’un ? Est-ce qu’on aide une maman croulant sous les dettes en remplissant les cases du dossier de surendettement ? Ou bien l’aide-t-on véritablement en prenant le temps de comprendre, avec elle, comment elle a accumulé ces dettes, et en prenant le temps de réfléchir, avec elle, comment faire pour que ça ne recommence pas ? Accompagner et « faire avec » sont les mots clés de l’éducateur : il se place à côté de la personne qu’il accompagne, il ne fait rien à sa place mais il fait tout avec elle ; il met tout en oeuvre pour que cette personne construise ses propres repères, qui vont lui permettre d’avancer, le plus sereinement, sur le chemin de sa vie.  

COMMENT FONT LES EDUCATEURS POUR EDUQUER ? « Il faut savoir ce que tu veux. Si c’est te faire aimer d’eux, apporte des bonbons. Mais le jour où tu viendras les mains vides, ils te traiteront de grand dégueulasse. Si tu veux faire ton travail, apporte-leur une corde à tirer, du bois à casser, des sacs à porter. L’amour viendra ensuite, et là n’est pas ta récompense. »

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Fernand Deligny, éducateur
  L’observation des comportements, l’écoute et la parole constituent la boîte à outils de l’éducateur dans la relation avec la personne qu’il accompagne. Observer, écouter, parler… ces actions demandent à être pensées et mûrement réfléchies avant de commencer tout travail éducatif. La psychologie et la pédagogie sont des enseignements qui font partie de la formation de l’éducateur (voir ci-dessous). Les premiers temps de la relation éducative sont marqués par un transfert entre l’éducateur et la personne accompagnée : une identification s’opère, la personne accompagnée trouve dans l’éducateur des repères auxquels elle va pouvoir s’accrocher durant un temps donné. Ce transfert est la condition sine qua non, sans laquelle il n’y a pas de relation éducative. C’est aussi un état qu’il faut apprendre à maîtriser pour ne pas enfermer la personne accompagnée dans une relation qui n’a pas vocation à perdurer. La relation éducative est nécessairement temporaire puisque sa finalité est l’autonomie de la personne. Aussi, pour permettre à la personne accompagnée de s’ouvrir au reste du monde et d’accéder à l’autonomie, l’éducateur doit travailler en réseau : autres travailleurs sociaux (conseiller d’insertion, assistantes sociales…), juristes, associations dans divers domaines (logement, justice, emploi, formation, santé, art…), professeurs, employeurs etc. Aussi, les éducateurs doivent travailler cette relation éducative avec un professionnel, lors de réunions régulières appelées supervisions ou analyses de pratiques, afin de parler de cette relation et éviter de s’y enfermer (ce qu’on appelle le contre-transfert : l’éducateur aussi, inconsciemment, fait des projections sur la personne accompagnée). Pour donner corps à ces outils fondamentaux (observer, écouter, parler), l’éducateur va se servir d’activités « supports » diverses et variées : chantiers éducatifs, séjours de rupture, activités sportives, ateliers divers (sculpture, musique, théâtre, danse…). Il va aussi accompagner la personne dans les différentes démarches qu’elle a à accomplir dans sa vie quotidienne : s’inscrire dans un établissement scolaire, demander l’aide juridictionnelle, refaire des papiers d’identité perdus, passer son permis de conduire, prendre rendez-vous au centre d’information et d’orientation, à la mission locale, à pôle emploi etc.

QUI ACCOMPAGNENT-ILS ? Les éducateurs interviennent auprès de personnes qui éprouvent des difficultés dans leur vie quotidienne, pour des raisons variées : déscolarisation pour les plus jeunes, rupture familiale, souffrance psychique (déprime, anorexie, boulimie…), toxicomanie, précarité économique, délinquance, errance etc…
 Les personnes que les éducateurs accompagnent peuvent donc être des personnes handicapées, des enfants en difficultés d’apprentissage, des jeunes déscolarisés, des jeunes délinquants, des personnes toxicomanes, des personnes sans domicile fixe, des personnes atteintes d’une pathologie psychiatrique etc. Ils interviennent également, avec l’accord de la personne accompagnée, auprès de leur famille dans le cadre de démarches administratives, d’une médiation, d’une thérapie familiale etc. 
Focus sur l’accompagnement de jeunes majeurs errants dans la rue… Récit d’un éducateur de rue… [Les] jeunes que je rencontre dans la rue [sont] toujours au même endroit, en groupe, du matin jusqu’au soir, apathiques. Ils sont pour la plupart hébergés par des proches. Une minorité squatte des logements ou dorment chez des « potes de galère », lorsqu’ils sont en conflit avec leur famille, qu’ils ont trop bu et ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils consomment beaucoup d’alcool et de cannabis, à toute heure. Ils sont pour la plupart impliqués dans du trafic illégal (vente de cannabis, de vêtements ramenés de Thaïlande, de vols..). Ils sont en grande majorité issus de l’immigration. Ils vivent depuis toujours dans le quartier. Certains ont déménagé d’une cité à une autre. Ils ont presque tous quitté l’école au collège, sans avoir obtenu le brevet. Depuis, ils errent dehors, à l’intérieur du quartier, qu’ils quittent rarement en parlant parfois de travail et/ou en effectuant de temps en temps des petites mission. Physiquement, ils paraissent toujours plus vieux que leur âge. Certains arborent des lunettes de soleil et des capuches ou casquettes pour cacher leurs yeux rougis par leurs consommations de drogue et d’alcool, pour s’effacer du paysage. De manière générale, ils font attention à leur hygiène mais ils leur arrivent, pour certains régulièrement, de se négliger pendant quelques jours : ils ne se rasent pas, s’habillent en sombre et se camouflent pour ne pas être vus. Des jeunes qui travaillent de façon plus ou mois précaire fréquentent ces lieux également. Ils se retrouvent là le soir, après le travail. Leurs lieux de regroupement ne varient pas : dans le centre commercial à ciel ouvert, dans les moments de froid dans une cage d’escalier. Ces lieux sont très sales ; parfois, ils urinent au même endroit et des odeurs nauséabondes se dégagent. Ils sont très attachés aux lois de la rue : discrétion, observation constante, communication par des gestes, des regards, des attitudes. La violence physique et morale est présente de manière constante et imprévisible : les insultes sont quotidiennes et les bagarres éclatent rapidement. Ils éprouvent de grandes difficultés à construire une vie de famille saine. Leur rapport aux femmes est souvent violent. Les partenaires sexuels sont multiples. Les actes sexuels se font régulièrement sans protection. Les paternités non désirées sont fréquentes.En parallèle, ils montrent un grand intérêt pour engager des discussions qui leur apportent une distance par rapport à leur quotidien. Ils sont en quête d’une relation où on leur montre de l’attention et du respect. Ils n’ont pas une grande estime d’eux-mêmes car ils vivent des situations d’échecs à répétition.
Une fois que la relation éducative est engagée, leur demande première concerne en général la recherche d’un emploi, d’un logement, d’un hébergement ou l’accompagnement dans une procédure judiciaire. Les problématiques liées à la santé et à la famille sont abordées dans un deuxième temps, lorsqu’une envie de changer de vie, même minime, se fait sentir. Par exemple, quelques accompagnements  ont récemment concerné :
 –      une procédure judiciaire avec l’assistance d’une avocate bénévole devant le tribunal correctionnel de 5 jeunes accusés d’avoir incendié un véhicule, –      la réalisation de chantiers d’insertion en lien avec des entreprises d’insertion, –      l’orientation vers la mission locale afin d’entreprendre des formations professionnelles ou de commencer des démarches liées à une création d’activité, –      la visite en prison d’un jeune homme rencontré sur le quartier afin de maintenir le lien et accompagnement lors de sa libération conditionnelle, –      des démarches relatives à la régularisation de personnes sans papier,
 –      des demandes d’échelonnement des paiements des amendes au trésor public,
 –      des procédures de dispense d’inscription du bulletin n°2 du casier judiciaire et d’effacement du STIC (système de traitement des infractions constatées),Toute démarche de ce type est avant tout un moyen de passer du temps avec le jeune et de parler. C’est à partir de nos échanges que je vais orienter la façon de me positionner à ses côtés afin de l’amener à avoir l’envie de bouger, de se saisir d’opportunités, de trouver en lui les clés pour rebondir dans sa vie.

COMMENT INTERVIENNENT-ILS ?Milieu ouvert… Milieu fermé…
 Les éducateurs peuvent travailler en milieu ouvert, c’est à dire qu’ils sont amenés à se déplacer au domicile des familles ou vont à leur rencontre dans la rue. Ils peuvent aussi travailler au sein d’un service d’accueil de jour, dont le rôle est de faire vivre un lieu d’accueil des publics durant la journée. Ils peuvent également travailler en milieu fermé, c’est-à-dire dans un lieu d’hébergement dont l’entrée et la sortie sont soumises à des conditions particulières : foyers, centre d’hébergement et de réinsertion sociale, centres éducatifs fermés, maisons d’enfants à caractère sociale, institut médico-éducatif… 

A la demande de la personne accompagnée, de sa famille ou avec son consentement
 Les services d’aide sociale, au sens large, regroupent tous les dispositifs prévus par la loi en vue d’assurer l’accueil et l’accompagnement de personnes en difficultés dans le cadre de mesures administratives, c’est-à-dire avec leur accord. Selon les publics accueillis, les éducateurs travaillent dans des foyers éducatifs, des associations de prévention spécialisée, des services d’aide sociale à l’enfance, des structures d’insertion, des associations accompagnant les personnes sans domiciles fixes, des centres d’accueil pour les personnes handicapées etc. La loi prévoit l’organisation de ces services dans le code de l’action sociale et des familles (voir le site : www.legifrance.org). Il s’agit soit de services publics soit d’associations habilitées par les conseils généraux, les services de sécurité sociale ou les ministères compétent (Justice, Affaires sociales…).
 Les modalités d’intervention sont diverses. Selon les services concernés, l’orientation de la personne vers un éducateur sera décidée soit par un juge des enfants, soit par un service d’action sociale ou médico-sociale (aide sociale à l’enfance, maison départementale des personnes handicapées, service social départemental), soit directement par la structure d’accueil (association de prévention spécialisée). 

Dans le cadre de mesures imposées par un juge Parfois, à l’occasion d’un jugement pour un crime ou un délit, le juge rend une décision comprenant l’obligation d’être suivi par un éducateur soit de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) soit du service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP).
 La protection judiciaire de la jeunesse prend en charge des mineurs délinquants dans des foyers ou des centres fermés alternatifs à la prison. Les éducateurs de la PJJ peuvent également accompagner des jeunes dans leur insertion sociale et professionnelle dans des services d’accueil de jour. Ils accompagnent également les mineurs incarcérés (en prison). Leur mission principale est de favoriser l’insertion socioprofessionnelle des jeunes délinquants. Pour en savoir plus : http://www.justice.gouv.fr/justice-des-mineurs-10042/la-dir-de-la-protection-judiciaire-de-la-jeunesse-10269/les-missions-educatives-de-la-dpjj-18677.html  Le service pénitentiaire d’insertion et de probation intervient auprès de personnes majeures sous main de justice, incarcérées (en prison) ou en liberté (sursis, libération conditionnelle, semi-liberté, contrôle judiciaire). Leur mission principale est la prévention de la récidive. Pour en savoir plus http://www.metiers.justice.gouv.fr/presentation-des-metiers-10070/les-metiers-de-ladministration-penitentiaire-10072/personnels-dinsertion-et-de-probation-11802.html

Focus sur l’accompagnement d’adolescents placés en foyers éducatifs… Extraits de l’ouvrage de Marc ZERBIB, « La mort du père dans le travail social »
 « POUR UN VERRE DE SODADans une maison d’enfants à caractère social (MECS), qui accueille une dizaine d’adolescents, âgés de 13 à 18 ans, […] Laurent, un éducateur spécialisé en formation, en stage dans cette institution, expose une situation de conflit avec Simon, un jeune garçon, et s’interroge sur son rapport à l’autorité et à la loi.Simon a 14 ans. Ce jour-là à la fin du repas, Simon demande à Laurent s’il peut boire un verre de soda d’une bouteille qu’il avait achetée dans la matinée. Les « règles de vie » en vigueur dans cette maison stipulent que les bouteilles de soda doivent rester dans le bureau des éducateurs, sans doute pour que les enfant ne s’en gavent pas avant les repas. Laurent, jeune professionnel, accepte, en précisant bien qu’il fait une exception à la règle : que Simon boive un verre, à la condition après avoir bu cet unique verre de remettre impérativement la bouteille de soda à sa place, dans le bureau des éducateurs. Mais Simon refuse de remettre la bouteille à sa place et la monte dans sa chambre. Laurent insiste pour qu’il redescende cette bouteille. Simon continue de s’y opposer. La tension monte. « J’avais la sensation, rapporte Laurent, que Simon voulait déclencher une crise. » Alors, pour faire preuve d’autorité, après avoir rappelé la loi qui stipulait la place de la bouteille de soda et après avoir […] prévenu Simon, Laurent décide de monter dans la chambre de l’adolescent pour récupérer la bouteille et la mettre dans le bureau. Le passage à l’acte produit son effet. Simon devient très violent verbalement et physiquement, allant jusqu’à obliger Laurent et sa collègue à intervenir physiquement pour le contenir. Les insultent pleuvent. Simon lance : « Vous faites chier, vous les connards de parents ! », et rectifie immédiatement son erreur en remplaçant le mot « parents » par le mot adéquat, le mot « éducateurs ». Ce lapsus, Laurent le relève consciencieusement […] mais il observe également que la production de ce lapsus le calme et transforme sa crise de violence en crise de larmes.Alors, s’interroge Laurent, que représentent les éducateurs ? A quelle place sont-ils mis par Simon dans ce conflit qui semblait pourtant si mineur ? A la place de ces « connards de parents » comme le lapsus semble à première vue l’indiquer, mettant, dans le même sac de « chiants », parents et éducateurs qui s’opposent à la toute-puissance de son désir ? » 

QUELLE EST LA FORMATION DES EDUCATEURS ? Des écoles d’éducateurs comme les IRTS, instituts régionaux de formation des travailleurs sociaux, forment les futurs professionnels. Le diplôme correspondant est le DEES, diplôme d’état d’éducateur spécialisé. Pourquoi spécialisé ? D’une part en raison de leur mode d’intervention (la relation éducative), d’autre part en raison du public auprès duquel ils interviennent (des personnes en difficultés). On rentre dans les écoles d’éducateurs après avoir obtenu le baccalauréat (ou une équivalence) et sur concours d’entrée. L’école dure 3 années : elle alterne formation théorique et pratique, soit 1450 h de formation théorique et 2100 heures de stages.
 On y enseigne quatre domaines de compétences : 1. Accompagnement social et éducatif spécialisé, 2. Conception et conduite de projet éducatif spécialisé, 3. Communication professionnelle, 4. Implication dans les dynamiques partenariales, institutionnelles et inter-institutionnelles.
 Les enseignements théoriques visent à donner des connaissances au futur éducateur en matière de psycho-pédagogie, de droit, d’économie, de techniques éducatives, d’analyse de pratique… 
Pour en savoir plus :– Ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale : http://www.solidarite.gouv.fr/IMG/pdf/Educateur_specialise.pdf– Actualités sociales hebdomadaires : www.ash.tm.fr– Ministère de la justice : http://www.metiers.justice.gouv.fr/presentation-des-metiers-10070/les-metiers-de-la-protection-de-la-jeunesse-10073/educateurs-11799.html#4 – Le site du juge des enfants J-P Rosencveig : http://jprosen.blog.lemonde.fr/
Conseil de lecture : Autobiographie d’une courgette, de Gilles PARIS, adapté à la télévision http://www2.cndp.fr/TICE/teledoc/mire/teledoc_cestmieuxlavie.pdf