Faits et procédure :

La SAS POTEZ Aéronautique (l’employeur) conçoit et fabrique des matériaux aéronautiques destinés aux programmes civils et de défense de ses clients. Elle emploie plusieurs centaines de salariés.

En 1990, Monsieur Alain J. (le salarié) a été engagé par contrat à durée indéterminée en qualité de cariste. A compter de 2008, ce salarié a occupé plusieurs postes d’agent de magasin.

En 2013, il est surpris en train de fumer par le responsable maintenance dans l’atelier, sous le chapiteau derrière le bâtiment Airbus Caravelle.

Or, ce dernier ne pouvait ignorer le règlement intérieur de l’entreprise qui stipule au paragraphe 15 « Hygiène et Sécurité », qu’il est strictement interdit de fumer dans l’enceinte de l’entreprise.

Monsieur Alain J. reçoit une lettre recommandée avec accusé de réception, pour le convoquer à un entretien préalable à une mesure disciplinaire (pouvant aller jusqu’au licenciement).

Lors de l’entretien, le salarié nie les faits, prétextant ne pas avoir été pris en flagrant délit.

L’employeur lui notifie son licenciement pour faute par lettre recommandée avec accusé de réception, car il estime qu’il ne peut pas maintenir la relation contractuelle avec une personne ne respectant pas les règles internes à l’entreprise et qui de surcroit n’hésite pas à mentir.

Le salarié a saisi le Conseil de Prud’hommes de Mont de Marsan, pour faire juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire et obtenir la condamnation de l’employeur au paiement des salaires non perçus.

Par jugement, le Conseil des Prud’hommes déboute le salarié de sa demande et le condamne à indemniser la société de tous les frais de procédure.

Monsieur Alain J. interjette appel de la décision du Conseil des Prud’hommes.

Problème de droit :

Le non-respect par le salarié du règlement intérieur de l’entreprise l’interdisant de fumer justifie-t-il son licenciement ?

Parties à l’instance :

Demandeur : Monsieur Alain J.

Défendeur : La Société POTEZ

Demande des parties :

Monsieur Alain J demande à la Cour d’appel de revenir sur le jugement du Conseil des Prud’hommes. En appel, il demande à son employeur de lui payer les sommes de :

  • 50.000 euros de dommages et intérêts en indemnités de rupture de son contrat de travail (Art. L.1235-3 du Code du travail)
  • 15.000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral (Art. l’article 1382 ancien du Code civil).

Il conteste les faits qui lui sont reprochés et soutient que l’employeur n’en rapporte pas la preuve.

Monsieur J. estime qu’il a été licencié car il a eu un arrêt de travail pour maladie professionnelle assorti d’une restriction établie par le médecin du travail imposant à l’employeur d’adapter son poste. (D’où ses changements de poste). De plus, il invoque le principe selon lequel le doute doit lui profiter.

La Société POTEZ demande à la Cour d’appel de confirmer purement et simplement le jugement du Conseil des Prud’hommes et de condamner Monsieur Alain J. au paiement d’indemnités de procédure de 4.000 euros.

Pour prouver les faits, la société POTEZ produit deux attestations de témoins qui étaient présents sous le chapiteau et qui ont senti une forte odeur de cigarette tout en apercevant simultanément, le salarié Alain J. sur son chariot à vive allure.

La forte odeur qui régnait établissait sans contestation possible qu’une personne venait de fumer, or la seule personne qui se trouvait en ce lieu était Monsieur Alain J, lequel s’en est éloigné précipitamment à l’arrivée de son supérieur hiérarchique.

L’employeur réaffirme que le règlement intérieur de l’entreprise, interdit formellement de fumer dans l’entreprise (bureaux individuels en internes ou les espaces collectifs extérieurs) sous peine de sanctions disciplinaires voire de contraventions.

En outre, le dossier médical du salarié mentionne bien un tabagisme ancien (10 à 15 cigarettes par jour).

Solution de la Cour d’appel :

Les magistrats jugent que l’appelant (Monsieur Alain J) n’apporte pas la preuve d’une faute de l’employeur dans les circonstances de la rupture ; que ses conditions ne sont pas vexatoires et ne justifient pas le paiement de dommages et intérêts.

Sa demande est donc rejetée.

Le jugement du Conseil des Prud’hommes qui n’a pas donné suite aux demandes de Monsieur Alain J. est confirmé.

Enfin, la Cour estime que la lettre de licenciement rappelle objectivement les faits et les éléments sur lesquels repose la décision de l’employeur et qualifie les faits retenus en expliquant la sanction prononcée.

La responsabilité de la Société POTEZ n’est pas retenue et le jugement du Conseil des Prud’hommes est confirmé en tous ses points.

Cour d’appel de Pau du 25 octobre 2018