Le 11 Janvier 2015, aux Sables-d’Olonne, Thierry participait à un rassemblement organisé sur la voie publique en hommage aux victimes du terrorisme commis à Paris ( Charlie Hebdo ) et dans sa banlieue ( l’Hyper Cacher de Vincennes ).

Lors de ce rassemblement, Thierry a décidé de brandir une pancarte sur laquelle était inscrit, d’un côté, « je suis humain – je suis Charlie » et, de l’autre côté, « je suis la vie », la représentation d’un cœur et « je suis Kouachi » ( les frères Kouachi étant les auteurs de l’attaque terroriste ayant visé la rédaction de Charlie Hebdo ).

Pour avoir apposé cette dernière inscription sur sa pancarte, Thierry a été poursuivi pour l’infraction d’apologie du terrorisme prévue par l’article 421-2-5 alinéa 1er du Code pénal.

Le tribunal correctionnel saisi de cette affaire a considéré que Thierry était bien coupable d’apologie du terrorisme et l’a condamné.

Thierry a cependant fait appel de cette décision. La cour d’appel de Bordeaux a toutefois suivi le tribunal correctionnel en confirmant la décision de condamner Thierry à un mois d’emprisonnement avec sursis et 500 euros d’amende.

Non content de cette dernière décision, Thierry a saisi la Cour de cassation afin d’être déclaré non coupable du délit d’apologie du terrorisme.

Problème de droit

Le fait de soutenir un terroriste à l’occasion d’un rassemblement de soutien aux victimes d’attentat constitue-t-il une apologie du terrorisme ?

Identification des parties à l’instance
Thierry = appelant ( celui qui conteste la décision rendue ).
Ministère public = intimé ( celui qui se défend des demandes de l’appelant ).

Demandes des parties à l’instance

Thierry estime que les mentions « je suis la vie », la représentation d’un cœur et l’inscription « je suis Kouachi » sur l’un des côtés de sa pancarte ne doivent pas être considérées comme étant de l’apologie du terrorisme, en l’occurrence de l’attaque perpétrée par les frères Kouachi à la rédaction du journal Charlie Hebdo.

Il considère que ces mentions doivent être vues comme un appel en faveur d’un échange entre opinions opposées. Autrement dit, en apposant ces mentions, Thierry prétend avoir souhaité ouvrir un débat avec d’autres personnes présentes lors du rassemblement de soutien aux victimes des attentats commis entre les 7 et 9 Janvier 2015 à Paris et sa banlieue, ne partageant pas ses mêmes idées.

Le Ministère public soutient, à l’inverse, que lesdites inscriptions présentes sur l’un des côtés de la pancarte de Thierry constituent l’infraction d’apologie du terrorisme prévue par le Code pénal et doivent ainsi être réprimées.

Solution de la Cour de cassation

La Cour de cassation rejette le pourvoi de Thierry et confirme la décision de la cour d’appel de Bordeaux.

Elle rappelle que la cour d’appel de Bordeaux a, à juste titre, considéré que les différentes mentions apposées par Thierry sur la pancarte qu’il a brandi lors du rassemblement mettent davantage en évidence un soutien en faveur des auteurs des attentats plutôt qu’à celui des victimes.

Elle rappelle également que ladite cour d’appel considère que les mentions en cause ne contiennent aucun appel en faveur d’un échange entre opinions opposées, comme l’a prétendu Thierry, et ne peuvent être qu’une assimilation, par glorification et héroïsation, aux auteurs des actes terroristes, et par extension un soutien à ces actes terroristes, compte tenu notamment du contexte marqué par des attaques terroristes coordonnées et revendiquées.

Après avoir souligné et soutenu la position de la cour d’appel, la Cour de cassation précise que le délit d’apologie d’actes de terrorisme consiste dans le fait d’inciter publiquement à porter sur ces infractions ou leurs auteurs un jugement favorable, sans qu’il y ait nécessairement à établir que les propos en cause soient en relation avec une entreprise terroriste. En d’autres termes, le simple soutien d’actes terroristes et/ou de ses auteurs constitue l’infraction d’apologie du terrorisme et peut donc être sévèrement condamné !

En l’espèce, la Cour de cassation considère que les mentions inscrites sur la pancarte de Thierry ont pour effet d’inciter publiquement à porter aux auteurs des attentats un jugement favorable. Il s’agit donc d’apologie du terrorisme. En conséquence, elle confirme la décision de condamnation de la cour d’appel de Bordeaux.

Cour de cassation, chambre criminelle, 11 Décembre 2018 ( pourvoi n° 18-82.712 )

autre cas pratique https://initiadroit.com/apologie-du-crime-2/